Parti découvrir la Laponie en compagnie d’une chamane Sami, notre groupe est revenu illuminé de la présence et la beauté de la nature qui nous a transformés. Récit de ce voyage initiatique.

La Laponie : se reconnecter avec le ciel

Quand je suis arrivée en Laponie, ce qui m’a d’abord frappée c’est la luminosité. J’avais entendu parler des nuits très longues et du peu de lumière mais je n’ai jamais autant admiré le ciel et ses tonalités changeantes. Du lever au coucher de soleil, le ciel est un ravissement. Le matin, c’est dans des tons de rose et bleu layette que l’azur s’offre à nos yeux. Vers 11h, nous avons eu le privilège d’observer des nuages de perles, qui apparaissent en vastes trouées dans l’air devenait toutes irisées. Puis vers 12h, le soleil fait briller la neige de mille feux. Enfin vers 15h, le ciel s’embrase dans des nuances de rouge et orange. J’aurais pu rester des heures à admirer un tel spectacle et prendre des milliers de photos chaque jour.

Coucher de soleil

La nuit aussi est une splendeur

On va souvent en Laponie pour y admirer des aurores boréales, et c’est vrai qu’elles sont magnifiques et elles ont eu pour notre groupe une intensité particulière. Le dernier soir, nous étions là, dans le noir, aux alentours de 23h à scruter le ciel, plein d’espoir. Nous étions en train de débuter un rituel d’adieu et de remerciement. Soudain le ciel se mit à prendre une tonalité verte qui s’intensifia. Et là, l’apothéose, la nuit s’illumine, danse devant nos yeux. L’émotion monte dans le groupe. Des ooh ! Et des waouu ! éclatent et puis profondément touchés par le spectacle, les larmes au bord des yeux, nous nous contemplons en silence ce miracle. Nous avons reçu cet instant magique comme une bénédiction.

Le ciel s’illumine la nuit : Aurore nous rend visite

La Laponie est aussi le symbole de la neige

Le regard se porte aussi sur la terre, ou plutôt sur la neige puisque la Laponie est entièrement recouverte de neige à cette saison. Pour ma part, je n’avais jamais vu autant de neige. Les branches plient sous le poids des flocons et de la glace, La terre a complètement disparu sous un manteau blanc épais. Seuls quelques arbres apparaissent, et les maisons joyeusement peintes en rouge, jaune ou vert. J’ai la sensation de vivre un rêve éveillé. Un rêve de magie de Noël. C’est comme si Jack Frost m’accueillait en son pays et m’incitait à réveiller mon enfant intérieur.

Pascale s’éclate dans la neige

Marcher dans la neige en conscience

Nous étions en Laponie pour découvrir la nature. Nous avons donc expérimenté la marche dans la neige… Beaucoup de neige ! Mes pieds s’enfonçaient jusqu’à mi cuisse dans la poudreuse et jusqu’aux genoux si je portais des raquettes. J’ai découvert que marcher dans la neige avec des raquettes et sur une longue distance demande une technique particulière et un peu d’énergie. Une technique de respiration aussi. Mais s’enfoncer dans les profondeurs d’une forêt vieille de plus de 400 ans entre pins et bouleaux vaut bien un peu d’effort ! (lire l’article La marche consciente avec des raquettes à neige)

Michaël tire une luge et trace la piste pour le reste du groupe

Le silence nous accompagne

La Laponie est aussi le pays du silence. Certains cherchent à le combler, d’autres s’y enfoncent avec délectation. C’est mon cas. Le silence cotonneux de la neige est pour mes oreilles un repos de l’âme. Pas un bruit, juste un frémissement du vent dans les branches empesées de neige. Parfois, même le bruit de mes pas est de trop et je m’arrête pour tendre l’oreille et savourer le silence. Une envie d’immobilité m’étreint et je me laisse tomber dans la neige. Le paysage est sublime, tranquille. Une paix intérieure s’empare de moi et je soupire de bien-être. Mais le froid commence à envahir mon corps et alors que je cherche une solution pour me relever, un rire moqueur me submerge. Mes mains et mes jambes s’enfoncent et je n’ai aucune prise pour me relever. Telle une enfant, je n’ai d’autre solution que de me rouler jusqu’au chemin damé pour enfin me relever. À 4 pattes dans la neige je ris de moi-même.

Laponie au lever du soleil vers 10h

Une tradition chamanique ancrée

Guidés par Lena Greus, chamane Sami, nous avons découvert des lieux telluriques. Lieux sacrés, sites de rituels anciens, et chers à son cœur et à celui des Samis. Nous avons prié l’eau omniprésente tout autour de nous dans les sources, le lac, la rivière, la neige bien-sûr mais aussi le givre sur nos capuches et dans nos cheveux. Les divinités du panthéon Sami sont d’ailleurs très féminines. Même le soleil, Beaivi, est vénéré comme un esprit féminin. Tout ici est porteur de signes. Toute la nature nous confronte et nous inspire. Pour survivre il a fallu aux Samis être en communion avec leur environnement et apprendre le monde matériel mais aussi à voir dans le subtil. Aujourd’hui à Karesuando, c’est Lena qui s’efforce de faire revivre les traditions perdues de son peuple et qui nous les partage.

Le rituel du feu dans un tipi sami

Voyage à la rencontre de la faune

Pendant nos randonnées, nos yeux s’égaraient entre ciel et terre espérant détecter la présence d’un animal sauvage. Non, pas d’un ours, alors en pleine hibernation mais peut être un troupeau de rennes, un origan ou à défaut un petit lapin blanc, un corbeau ou une perdrix blanche. Chacun de ces animaux a une signification particulière dans la tradition chamanique Sami. Lena nous en conte la symbolique au détour d’une rencontre.

Selon la tradition, le renne a été offert aux Sames à condition qu’il en utilisent toutes les parties. La viande bien sûr pour se nourrir. La fourrure pour se vêtir et se maintenir au chaud : manteaux, bottes, gants, chapkas et même les nerfs servent de liens. Les bois de renne sont transformés en boutons, manches de couteau ou bijoux. Le renne comble tous les besoins matériels. Mais le corbeau porte les messages de l’au delà, la perdrix est vénérée et rencontrer un renne blanc une marque d’estime des mondes subtiles.

Un lapin est passé par là

La sobriété heureuse

La flore est principalement composée de mélèzes et de bouleaux. Là aussi, tout est utilisé pour la construction, le chauffage, la décoration ou pour construire des luges. Certains champignons servent à confectionner des pommades anti-moustique. En miroir, je me suis longuement interrogée sur ma façon de vivre et surtout consommer. Avons-nous tant besoin de tous ces vêtements, de tous ces objets? Le chalet de 30m2 de Léna est cosy, chaleureux, pratique. J’aime ses petites lampes accrochées aux fenêtres, son canapé douillet, la cheminée bienveillante. Cette maison en bois est même mieux chauffé que ma maison en Provence. Ne pourrions-nous pas vivre avec plus de sobriété? Pourquoi vouloir plus quand la sérénité est à portée de main?

Chez Lena

Cheminée, feu et sauna

Le feu, c’est l’élément qui rend la vie possible dans ces contrées glaciales. Bien entendu, nous avons dû l’allumer avec une pierre à feu. Pas facile quand on n’a connu que les allumettes mais quel bonheur dans la petite flamme apparaît ! Mais le feu est aussi le maître du sauna. Il y en a un dans presque toutes les maisons. Prendre un bon sauna pour se réchauffer, se laver, détendre les muscles, pour discuter aussi. Un sauna lieu symbolique du nettoyage intérieur pour renaître à soi. Ou même ritualiser un sauna entre femmes de toutes génération ou entre hommes. On y honore aussi les morts ou les naissances. Et puis sortir s’ébrouer dans la neige et revenir en courant, en riant, en criant. Le visage inondé de la joie d’avoir osé.

Dans la neige!

Un voyage initiatique puissant

Tout au long de ce voyage, nous avons tous été confrontés à nos peurs archaïques. Le voyage et la nature sont des révélateurs puissants. Peur du froid, de l’absence de lumière. Mais aussi  peur de l’effort physique ou peur d’avoir faim. Peut être aussi, la peur de se perdre ou de rester seul.e. Recherche d’équilibre pour beaucoup d’entre nous. Équilibre relationnel pour trouver sa place dans le groupe, dans sa vie, dans la nature. Mais nous avons traversé ensemble ces espaces inconfortables et avons suivi la lumière de l’étoile polaire pour nous guider. Une étoile brille pour toujours au coeur de chacun de nous. Une étoile qui fait briller nos yeux dès que nous entendons le mot « Laponie ».

Corinne Fontaine

Découvrir la Laponie et la Terre des Samis avec Léna Greus, Gérard Longuet et Michaël Rouhaud : en savoir plus

DATES PRÉVISIONNELLES 2024 : 2 séjours du 16 au 24 janvier et du 26 au 2 février

 

La Laponie source d’éveil intérieur