Les hommes pratiquent le yoga plus qu’avant. Et nous pouvons-nous en réjouir quelles que soient leurs motivations. Faut-il y voir les signes d’un changement significatif?
Est-ce la recherche d’équilibre et le besoin de vivre une masculinité plus apaisée et plus consciente ? Ou bien de prendre une part active positive dans la construction d’un monde plus équilibré, plus juste et égalitaire entre les valeurs féminines et masculines en soi ? C’est peut-être aussi une bonne manière de peser sur l’équilibre précaire dans la société humaine au-delà des identités de sexe ou de genre que ressentent les hommes dans leur quotidien. Le magazine Esprit Yoga de septembre – octobre 2022 publie un long article de Jeanne Pouget sur le thème du « yoga, porte vers une nouvelle masculinité » auquel j’ai eu le plaisir de participer.
Les hommes se mettent au yoga !
Et oui ! Il y a de plus en plus d’hommes y compris parmi les plus jeunes qui fréquentent les cours de yoga. Ils se lancent même dans des pratiques réputées plus « douce » comme le hatha-yoga , une approche lente et détendue du yoga par opposition à d’autres forme plus tonique ou dynamique considérée comme plus masculin. Des sondages montrent qu’on trouve environ 10% d’hommes dans les cours de nos jours. C’est peu, mais c’est nettement plus que le pourcentage moyen d’hommes qui s’engagent des pratiques d’épanouissement. À tel point que l’on voit apparaître aussi des cours de yoga pour les hommes. Une situation incroyable quand on sait que les cours de yoga en Inde était, jusqu’à très peu, réservés … aux hommes !.
Le yoga n’est plus juste « un truc de nanas » !
Jugé trop « mou », trop « lent », le yoga n’attirait pas trop les hommes ; un public souvent en recherche de performance et d’effort intense. De plus, l’image véhiculée par les médias, d’un yoga plutôt féminin avait tendance à rebuter aussi ceux qui souhaitaient soigner leur image de virilité. Et, puis soudainement, la mutation commence à se faire. En effet aujourd’hui, un nouveau public se tourne vers cette discipline d’une grande richesse. Des hommes de tous âges approchent le yoga, n’hésitant pas à bousculer l’image stéréotypée de la virilité. Du coup, ils redécouvrent une nouvelle relation à leur corps : moins d’injonction et plus d’écoute, de sensibilité nouvelle. La pratique du yoga invite en effet, à une relation d’écoute, de respect avec son propre corps, une relation plus apaisée avec ses émotions en se connectant à son intériorité et se rendre compte qu’on peut écouter et même laisser s’exprimer ces émotions. Il participe aussi à l’apaisement de l’activité mentale, donc conduit à plus de calme naturel sans contrôle excessif. Voilà quelques idées préconçues sur la virilité qui volent en éclat.
L’apparition de cours de yoga pour hommes
À Paris, Prosper Matussière a créé avec Samuel Urtado « le yoga des bons hommes ». Loin des clichés virilistes, ils ont inventé un espace adapté aux hommes, avec des variantes dans les postures et l’éveil à la sensibilité, au relâchement, à la relaxation, à la vulnérabilité. Après les cours, certains restent à discuter autour d’un café, créant ainsi un lieu de convivialité et d’appartenance. Prosper anime aussi des cours de yoga en milieu carcéral et constate le succès de cette discipline auprès de ce public inattendu et en demande de transformation.
Et si le yoga aidait ou était le signe de l’éclosion d’une « nouvelle masculinité » ?
De 2016 à 2020, j’ai organisé en France, les Rencontres du Masculin Sacré, une retraite de 4 jours entre hommes de tous âges, ponctuée d’ateliers animés par un grand nombre d’acteurs du renouveau du masculin. Méditation actives ou silencieuses, cercles de paroles, danses, ateliers créatifs, massages, yoga(s), qi gong, musiques, chants etc… y étaient proposés afin de ramener vers des expériences de ressenti et de sensoriel formateur de renouveau, faciliter la décharge des tensions et sortir les hommes de conditionnements archaïques et ouvrant à une meilleure compréhension des questions de sexualité et aussi d’identité.
Ces rencontres sont aussi un lieu où la fraternité peut se développer. Un espace où les hommes ne sont plus ni ennemis, ni concurrents mais des frères qui peuvent s’épauler, s’écouter, se comprendre. L’image de ce masculin chaleureux et la notion de sacré sont là pour rappeler que nous pouvons prendre soin les uns des autres, sans jugement et s’ouvrir à la rencontre de l’autre avec bienveillance et sans danger.
Vers un monde plus égalitaire ?
Le yoga participe à la création d’un monde basé moins sur la compétition. Il ouvre à une alternative à la domination du plus fort qui entretien la peur et les comportements potentiellement violents. Si on regarde l’étymologie de yoga, elle nous renseigne facilement. Le mot sanskrit yoga est dérivé de la racine YUJ qui signifie unir, lier ensemble, atteler qui a donné en latin « jungere », joindre… Mais joindre quoi? S’unir à qui? D’abord, en associant à la souplesse des articulations et du corps, une détente des systèmes émotionnel et psychique, le yoga permet de recréer une unité intérieure. Ce calme et cette harmonie du corps, puis du système émotionnel et des fonctions intellectuelles apparaissent comme une base facilitante de la relation.
Étant plus relaxé et plus ouvert, une rencontre d’égal à égal devient possible.
Clairement, après avoir commencé à ressentir le maillage subtil des qualités féminines et masculines en soi, que l’on soit homme ou femme ou non genré, alors s’estompe l’ombre menaçante de la différence. S’ouvre alors devant soi , dans la tolérance de l’ouverture, d’autres perspectives relationnelles plus équilibrées.
Gérard Longuet
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